À propos
Le festival
Spielact est un festival d’art pluridisciplinaire dédié à la création contemporaine. Depuis 2019 il propose au public un terrain de réflexion et de découverte artistique pour imaginer des futurs désirables. Organisant une exposition et plusieurs événements créatifs ou festifs ainsi que des tables rondes, la manifestation rassemble des artistes de tous bords et les réseaux professionnels dans l’idée de générer un espace d’échange avec le public. Spielact aimerait offrir une plateforme d’émulation et de rupture susceptible d’agir, notamment, sur nos représentations de l’art, important vecteur de cohésion, reflet de notre diversité et des préoccupations sociétales actuelles. Répondant à un désir de résistance, Spielact encourage la recherche de solutions d’avenir viables pour touxtes.
Édito – 6e édition
Spielact revient se déployer dans les locaux du Commun, à Genève, pour une 6e édition. Du 19 au 29 juin 2024, la manifestation explorera sous diverses formes et angles la thématique du travail de l’art et la condition des professionnel·le·x·s de la culture.
L’exposition collective de Spielact réunit cette année 21 artistes de la scène romande, alémanique et internationale. Baptisée Zahltag – « jour de paie » en allemand -, elle présente plus de 60 œuvres dont le dialogue scénographique nous plongera dans une foire d’art contemporain imaginaire ou fantasmée. Plusieurs visites commentées sont organisées pour guider le public à travers cet univers éclectique fait d’une pluralité de pratiques et d’approches.
C’est ensuite avec des journées de rencontres que Spielact abordera le monde du travail de l’art. Une trentaine d’artistes et acteur·ice·x·s culturel·le·x·s d’horizons multiples – associatif, militant, institutionnel ou encore du marché de l’art – mettront en lumière les enjeux actuels soulevés par cette thématique et par Zahltag lors de sept tables rondes, les 20, 22 juin et 23 juin.
Spielact 6e du nom, ce sont aussi des propositions liées aux arts vivants et à la musique : des performances, des concerts et un DJ set, notamment lors de la soirée de vernissage qui se tiendra dans la cour du Commun le 19 juin, dès 18 heures.
Enfin, le festival organise des ateliers créatifs et ludiques destinés aux enfants ainsi qu’un atelier pratique qui aidera les travailleur·euse·x·s de l’art ou aspirant·e·x·s à mieux faire face au monde professionnel.
Curation
Les arts visuels et le livre, en tant que milieux structurés et structurants, ne sont pas en capacité de se réformer. Ils dépendent de la condition que nous dénonçons car ils se sont érigés sur le mythe de l’artiste sélénite, irresponsable mais libre, si grisé·e de pensées qu’il·elle en oublie de se nourrir. Ce discours est une fable qui ne sert que ceux qui vivent du travail d’autrui.
– Aurélien Catin, Notre Condition, Essai sur le salaire au travail artistique, 2020
Zahltag
Fin du mois, jour de paie. Ou presque.
L’exposition Zahltag réunit une vingtaine d’artistes aux pratiques et parcours pluriels dans l’espace du Commun, à Genève. Le titre reprend l’expression commune «c’est jour de paie» et l’exprime dans le germanisme qui caractérise le nom du festival. En référence au jour précis où toute personne ayant accompli son travail reçoit son dû, ce titre interroge directement le statut et la nature du travail artistique. Car ce sont surtout l’irrégularité des revenus ou l’absence de salaire des gens œuvrant dans ce domaine qui sont monnaie courante.
Suivant la volonté de Spielact de consacrer sa sixième édition aux conditions de travail des professionnel·le·x·s de l’art, la foire d’art contemporain a été choisie comme thème principal de l’exposition, étant l’un des symboles du marché. S’intéresser au système de la foire dans cette optique implique de repenser le sens de ce genre d’événement, où l’enjeu n’est pas la rémunération des marchand·e·x·s ou des organisateur·ice·x·s, mais celle des artistes. Depuis le début du processus, Spielact a eu l’envie de présenter Zahltag comme une foire imaginaire. Elle l’est, dans le sens où ce type de format serait vraisemblablement inenvisageable dans un contexte commercial. Les œuvres ont une valeur mais ne sont pas mises à la vente. Il n’y a pas de stand, galerie, entité ou institution qui représentent les artistes, pas de prix décernés à quelques-un·e·x·s d’entre elleux ou à des exposant·e·x·s, pas de billet d’entrée, pas d’espaces VIP, de presse ou d’édition. À la place d’imaginaire, on pourrait donc la qualifier d’appropriation fictionnelle, ludique, critique, alternative, fantasmée, marginale, interprétative, revendicative, personnelle, à part, furieusement variée, inspirée par les artistes qui la composent et par la pertinence de leur travail.
Concrètement, Zahltag s’approprie le terme de «foire» en investissant son potentiel théâtral et reproductible. La proposition s’inspire partiellement d’un supermarché abandonné ou en sommeil, où les œuvres reposent la nuit et sont observées/consommées le jour. Elle joue aussi avec son sens festif et son effervescence, imaginant l’exposition comme une grande scène ouverte, lieu de représentation et de jeu de rôle, où les desseins des un·e·x·s se mêlent aux aspirations des autres.
Dans une scénographie sobre, à l’inverse de celle de la foire, les œuvres délimitent leurs propres espaces et reprennent néanmoins certains de ses codes. Une zone domestique questionne la place de l’individu dans et en dehors de la foire. Une salle d’inspiration post-apocalyptique met en lumière des matériaux métalliques, industriels, usés et organiques. Un espace commercial, avec des œuvres qui pourraient être produites en série, s’inspire de la publicité, critique la surproduction et la surconsommation. Un endroit radicalement blanc et noir vient en contrebalancer un autre, aux couleurs ostensibles. Dans les émanations textuelles, le discours est parfois fait par les œuvres elles-mêmes. La présence de texte, tantôt frontale comme des slogans ou des manifestes, tantôt subtile et implicite, vient contrecarrer l’affichage omniprésent et parfois agressif de la foire traditionnelle, où les noms et informations sont partout. À la place d’un fort éclairage zénithal uniforme, des sources lumineuses de formes diverses se dirigent vers certaines pièces uniques ou regroupements d’œuvres plus homogènes. Abandonnant le modèle des booths tout en conservant une certaine répartition spatiale, une ambiance singulière est créée par la nature et l’agencement des formes, proposant une multitude de parcours aux gens qui s’y promènent, dans les deux étages du bâtiment du Commun.
Les pièces abordent la question du statut de l’artiste et la nature de son travail de manière plus ou moins immédiate, sous divers angles. Certaines le font directement à travers leur sujet, leur forme ou les matériaux qui les composent. Certaines à travers les références ou métaphores qu’elles invoquent. D’autres enfin disposent de plusieurs possibilités d’interprétation, servant d’atout pour révéler le sens d’une autre œuvre à proximité ou de jeu de piste, où différents degrés de lecture doivent être appliqués pour que la proposition fasse mouche. Toutes ces pièces sont choisies pour leur potentiel subversif et humoristique, leur force esthétique et expressive, leur simplicité et efficacité, leur caractère politique, la richesse de leur fabrication et la qualité de leur réflexion. Elles ont en commun une certaine singularité, ne faisant sens collectivement qu’à condition que toutes s’imbriquent correctement dans un ensemble. Un peu comme les parois de faux murs s’alignent sur les tapis colorés des grandes foires commerciales.
À Spielact, on réfléchit beaucoup, on expérimente souvent et on remodèle constamment. Zahltag est le résultat de plus d’une année d’un travail qui fourmille et se construit patiemment, entre coups de cœur et émulations, évidences et compromis nécessaires. Ici, on cause galère, condition, tracas, statut, promesse, contrat, diversité, désenchantement, bénévolat, temps partiel, déception, représentation, existence et sens. On discute aussi embauche, rémunération, réussite, ambition, revendication, impact, mérite, engagement, activisme, unité, intelligence, espoir et sens. En bref, on questionne ce qui fait notre métier, comment on l’exerce et ce qu’il faudrait entreprendre pour qu’il reste viable.
La sixième édition du festival tente d’aborder ces questions de front, non pas seulement en tant qu’invective ou revendication mais comme un sujet auquel réfléchir collectivement. Les enjeux soulevés par Zahltag sont notamment abordés lors de rencontres, tables rondes et ateliers qui réunissent des artistes et intervenant·e·x·s d’horizons divers, associatifs, militants ou institutionnels, des protagonistes du marché, des représentant·e·x·s de galeries et d’off spaces, directement dans Le Commun, au cœur de l’exposition. Autre lien avec la foire, où l’emplacement des moments de rencontre et de réflexion sont eux-mêmes une question dont on peut débattre.
Zahltag peut être critique même si ce n’est pas son but premier. C’est une exposition collective qui utilise des codes de la foire sans le poids de devoir en être une. Elle joue avec certaines règles qui la caractérisent, sans être obligée de s’y plier. Elle caricature et imite certaines spécificités du système dans lequel elle est créée, sans la prétention d’être une idée révolutionnaire. Elle est artistique et éphémère par nature. Toutefois, soyons clair·e·x·s : ne pas être vindicatif·ve·x·s ne signifie pas un manque d’intransigeance quant aux environnements où les artistes et autres travailleur·euse·x·s de l’art évoluent. Le temps n’est pas à la tergiversation. La reconnaissance de notre travail et sa juste rémunération ne sont dorénavant plus des options soumises à conditions. Elles sont nos revendications premières et les enjeux pour lesquels nous actons tous les jours. Le travail, tous les jours. Le salaire, au jour de paie.
Amir El May & Sylvain Gelewski
Règles du jeu
Il est primordial pour Spielact d’offrir des espaces sécures, où chaque personne se sente la bienvenue. Durant nos événements, il n’y aura aucune tolérance envers les comportements racistes, homophobes, transphobes, validistes, grossophobes, enbyphobes, sexistes, classistes, âgistes ou toute autre forme de discrimination. Si vous êtes victime ou témoin d’un comportement inapproprié, n’hésitez pas à vous adresser aux membres de l’équipe.
L’équipe
Direction et programmation Amir El May (iel)
Co-programmation Sylvain Gelewski (il)
Administration Corinne Benoit (elle)
Coordination Suzan Efelti (elle)
Communication Camille Cancela (elle)
Logistique Maxime Wagner (il)
Graphisme Théo Keiflin (il)
Médiation culturelle Camille Lacroix (elle)
Site web Fabien Duperrex (il)
Photographie Daniel Leal (il)
Montage exposition Ted Haring (il) et Léo Reichling (il)
Construction scénographie Florian Gibiat (il)